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Marius Proville à Auschswitz |
Matricule
« 46022 » à Auschwitz
Marius
Proville
est né le 15 août 1893 à Aubervilliers (Seine / Seine-St-Denis).
Il est le fils de Madeleine Huet, 43 ans et
d’Emile Proville, 42 ans, vidangeur, son époux. Il est le cinquième d’une
fratrie de six enfants (Eugénie, Jules, Emile, Emile Hyppolite, Marius,
Fernand).
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53 rue des entrepôts à St Ouen |
Marius Proville habite au 53, rue des
entrepôts à Saint-Ouen (Seine / Seine-St-Denis) au moment de son
arrestation.
Il a vraisemblablement été mobilisé pendant
la guerre 1914-1918 (1) : il est recensé au bureau militaire N° 1 de la
Seine avec le matricule militaire 4843.
Il est métallurgiste, outilleur.
Marius Proville est arrêté comme communiste
le 27 juin 1941 sur réquisition du commissaire de police de Saint-Ouen :
les RG le soupçonnent de propagande communiste clandestine car il a été
avant-guerre un « meneur communiste
très actif » (2).
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Extrait de la liste des RG du 27 juin 1941, montage à
partir du début de la liste
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La liste des Renseignements
généraux répertoriant les communistes internés administrativement le 27 juin
1941, mentionne pour Marius Proville : « Meneur communiste très actif ».Cinq autres audoniens sont arrêtés à Saint-Ouen en même
temps que lui et pour les mêmes motifs, dont Ambroise
Sorin et Roger
Chaput.
Ces arrestations s’inscrivent dans le cadre
d’une grande rafle concernant les milieux syndicaux et communistes. En effet, à
partir du 22 juin 1941, jour de l’attaque hitlérienne contre l’Union
soviétique, les Allemands arrêtent plus de mille communistes avec l’aide
de la police française (nom de code de l’opération : «Aktion Theoderich»).

D’abord amenés à l’Hôtel Matignon (un lieu
d’incarcération contrôlé par le régime de Vichy) ils sont envoyés au Fort de
Romainville, où ils sont remis aux autorités allemandes. Ils passent la nuit
dans des casemates du fort transformées en cachots. Et à partir du 27 juin ils
sont transférés vers Compiègne, via la gare du Bourget dans des wagons gardés
par des hommes en armes. Ils sont internés au camp allemand de Royallieu à
Compiègne (Oise), administré par la Wehrmacht, le « Frontstalag 122 » camp destiné à l’internement des «ennemis
actifs du Reich», alors seul camp en France sous contrôle direct de l’armée
allemande. Il y est immatriculé entre les numéros 241 et 993 (numéros
connus des militants internés le 27 juin 1941 (2).
Marius Proville est déporté à Auschwitz dans
le convoi du 6 juillet 1942 dit des «45000».
Ce convoi d’otages composé, pour l’essentiel, d’un millier de communistes
(responsables politiques du parti et syndicalistes de la CGT) et d’une cinquantaine
d’otages juifs (1170 hommes au moment de leur enregistrement à Auschwitz)
faisait partie des mesures de représailles allemandes destinées à combattre, en
France, les Judéo-bolcheviks
responsables, aux yeux de Hitler, des actions armées organisées par le parti
communiste clandestin contre des officiers et des soldats de la Wehrmacht, à partir
d’août 1941. Lire dans le blog le récit des deux jours du transport : Compiègne-Auschwitz
: 6, 7, 8 juillet 1942.
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Immatriculation le 8 juillet 1942 |
Sa photo d’immatriculation (3) à Auschwitz a
été retrouvée parmi celles que des membres de la Résistance intérieure du camp
avaient camouflées pour les sauver de la destruction, ordonnée par les SS peu
de temps avant l’évacuation d’Auschwitz.
Après l’enregistrement, il passe la nuit au
Block 13 (les 1170 déportés du convoi y sont entassés dans deux pièces). Le 9
juillet tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau, situé à 4
km du camp principal. Le 13 juillet il est interrogé sur sa
profession. Les spécialistes dont les SS ont besoin pour leurs ateliers sont
sélectionnés et vont retourner à Auschwitz I (approximativement la moitié du
convoi. Les autres, restent à Birkenau, employés au terrassement et à la
construction des Blocks. Aucun des documents sauvés de la destruction ordonnée
par les SS peu de temps avant l’évacuation d’Auschwitz, ne nous permet de
savoir dans quel camp il est affecté à cette date.
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Dessin de Franz Reisz, 1946 |
Marius Proville meurt à Auschwitz le 19
septembre, d’après le certificat de décès établi au camp d’Auschwitz (in Death Books from Auschwitz Tome 3 page 968)
et le site internet © Mémorial et Musée
d’Etat d’Auschwitz-Birkenau) où il est mentionné avec son matricule, ses dates, lieux
de naissance et de décès, avec l’indication « Katolisch » (catholique).
Il convient de souligner que cent quarante-huit
«45000» ont été déclarés décédés à
l’état civil d’Auschwitz les 18 et 19 septembre 1942, ainsi qu’un nombre
important d’autres détenus du camp enregistrés à ces mêmes dates. D’après les
témoignages des rescapés, ils ont tous été gazés à la suite d’une vaste sélection interne des « inaptes au travail », opérée dans
les blocks d’infirmerie. Lire dans le blog : Des causes de décès
fictives
Un arrêté ministériel du 29 octobre 2009 paru
au Journal Officiel du 27 décembre 2009 porte apposition de la mention «Mort en déportation» sur ses actes et
jugements déclaratifs de décès. Mais il comporte une date erronée : « décédé le 25 août 1942 à Auschwitz (Pologne) ».
Il serait souhaitable que le Ministère prenne en compte, par un nouvel arrêté,
la date portée sur son certificat de décès de l’état civil d’Auschwitz,
accessible depuis 1995 et consultable sur le site internet du © Mémorial et Musée
d’Etat d’Auschwitz-Birkenau. Lire dans le blog l’article expliquant les
différences de dates entre celle inscrite dans les «Death books» et celle portée sur l’acte décès de l’état civil
français) Les dates de décès
des "45000" à Auschwitz.
Marius Proville est homologué « Déporté Politique ».
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La Stèle dans le square des 45000 et 31000 |
À Saint-Ouen, son nom est gravé
sur le Monument de la Résistance
et de la Déportation du cimetière communal, et sur la stèle érigée en « Hommage
aux résistants, femmes, hommes, déportés à Auschwitz-Birkenau »,
inaugurée le 24 avril 2005 dans
le Square des « 45.000 » et des « 31.000 » (le convoi du 24
janvier 1943).
Le neveu
de Marius Proville, Louis Proville (né le 23 juin 1906 à Aubervilliers)
est engagé dans la Résistance. Arrêté, il est déporté à Auschwitz par le convoi
du 27 avril 1944. Il y reçoit le matricule « 186.277 ». Louis
Proville est transféré à Buchenwald (le convoi dit des “Tatoués”) le 12 mai
1944, puis à Flossenbürg, Mauthausen et finalement Dachau, où il est libéré en
1945.
- Note 1 : Sur sa photo
d'immatriculation à Auschwitz, Marius Proville a l’œil gauche complètement
fermé : soit il s’agit d’un passage à tabac à son arrivée à Auschwitz (on
sait que beaucoup de déportés sont roués de coups dès la descende du train),
soit il s’agit d’une blessure ancienne, ayant entrainé une énucléation,
peut-être pendant la guerre 1914. Les registres matricules militaires de la
Seine nous permettront peut-être d’apporter une réponse.
- Note 2 : Liste « de noms de camarades du camp de Compiègne »,
collectés avant le départ du convoi et transmis à sa famille par Georges
Prévoteau de Paris XVIIIème, mort à Auschwitz le 19 septembre
1942 : il s’agit des matricules 241 à 3800. Liste au DAVCC.
- Note 3 : 522 photos d’immatriculation des « 45000 » à
Auschwitz ont été retrouvées. A la Libération elles ont été conservées dans les
archives du musée d’Auschwitz. Des tirages de ces photos ont été remis à
André
Montagne, vice-président de l'Amicale d'Auschwitz,
qui me les a confiés.
Sources
- Etat
civil en ligne d’Aubervilliers, tables décennales.
- Arbre
généalogique de Catherine Delecque (© Généanet).
- Témoignage
de Fernand
Devaux (décembre 1985).
- Fichier
national de la Division des Archives des Victimes des Conflits Contemporains (DAVCC
ex BAVCC), Ministère de la Défense, Caen. Fiche individuelle consultée en juillet
1992 et juin 1993.
- Archives de la Préfecture de police
de Paris, Cartons occupation allemande, BA 2397.
- Death Books from Auschwitz (registres des morts d'Auschwitz), Musée d’État
d’Auschwitz-Birkenau,
1995 (basé essentiellement sur les registres (incomplets) des certificats de
décès établis au camp d’Auschwitz ayant enregistré, entre le 27 juillet 1941 et
le 31 décembre 1943, le décès des détenus immatriculés).
- © Site Internet
Legifrance.
- © Site Internet
MemorialGenWeb.
- Dessin de Franz Reisz, in « Témoignages sur Auschwitz », ouvrage édité par
l’Amicale des déportés d’Auschwitz (1946).
Archives de la Préfecture de police de Paris. Renseignements
généraux, Liste des militants communistes internés le 26 juin 1941.
Biographie
mise
à jour en juin 2016 (installée en juillet 2014) par Claudine Cardon-Hamet, docteur en
Histoire, auteur des ouvrages : «Triangles
rouges à Auschwitz, le convoi politique du 6 juillet 1942 » Editions
Autrement, 2005 Paris et de Mille otages pour Auschwitz, le convoi du 6 juillet
1942 dit des «45000», éditions Graphein, Paris 1997 et 2000 (épuisé). Prière de
mentionner ces références (auteur et coordonnées du blog) en cas de reproduction ou d’utilisation
totale ou partielle de cette biographie. Pour la compléter ou la corriger,
vous pouvez me faire un courriel à deportes.politiques.auschwitz@gmail.com
Pensez à indiquer les sources et éventuellement les documents dont vous
disposez pour confirmer ces renseignements et illustrer cette biographie.
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